« L’Amérique, dans l’histoire, c’est d’abord un rythme ». Tout dans cet aphorisme de l’historien Pierre Chaunu aurait dû conduire les spécialistes de l’Amérique coloniale à se saisir et à interroger la question du rythme. Pourtant, après plus d’un demi-siècle d’avancées historiographiques et méthodologiques, les historiens ne semblent guère avoir reconnu dans ce concept — aux contours d’ailleurs souvent mal définis au sein de la discipline — un phénomène de première importance dans la marche qui entraîne la vie des hommes et des sociétés aux premières heures de la rencontre entre l’Ancien et le Nouveau Monde. Aussi, cette communication en forme d’essai invite-t-elle à explorer le rythme à la fois comme objet historique en ce qu’il structure les conceptions et les usages autochtones et européens du temps et de l’espace, mais aussi comme instrument intellectuel de l’historien qui, cheminant de concert avec l’anthropologue et l’archéologue, œuvre par une poétique qui lui est propre au repérage de scansions, de cycles et de surgissements à l’origine de nouvelles allures du temps.