Les mythes mésopotamiens et les mythes rencontrés chez Hésiode et Homère offrent sur certains motifs des points de convergence et leur rapprochement permet souvent un éclairage fécond. Quels éléments de réponse proposent ces mythes pour définir le statut de l’homme ? La question de l’alimentation semble cruciale dans les deux cas. J.-P. Vernant a mis en évidence comment le sacrifice lors de la crise prométhéenne a permis de distinguer le statut des hommes de celui des dieux et de celui des animaux. Pour les dieux, qui cherchent à préserver leur privilège d’immortalité, il est capital de distinguer leur nourriture de celles des hommes, et cela peut passer par l’utilisation d’une ruse (récit d’Adapa / Théogonie hésiodique) qui va définitivement sceller la destinée des hommes. Et il semble que dans les deux civilisations, c’est la question des céréales qui est au cœur de la définition du statut de l’homme : dans le cas d’Enkidu (Épopée de Gilgamesh), la consommation de pain et de bière va achever sa métamorphose de prototype d’homme en être humain civilisé ; dans les épopées homériques et les poèmes hésiodiques l’expression « mangeurs de pain » et ses variantes permettent de distinguer les hommes civilisés des êtres sauvages et l’homme accompli de l’ère historique dans les Travaux et les Jours est défini comme celui qui sait travailler la terre pour se nourrir des céréales qu’il fait cuire.